JOHANNES KEPLER

Johannes Kepler fut un astronome, mathématicien et physicien allemand des XVIème et XVIIème siècles (1571 - 1630). Etant devenu astronome bien après Copernic, il fut un fervent partisan de l'héliocentrisme. Il proposa quatre grandes propriétés concernant la mécanique céleste : une correspondance entre les solides platoniciens et trois lois. Nous allons étudier ces quatre propriétés pour comprendre l'importance de Kepler dans l'établissement des bases de l'héliocentrisme.

 

I. Les solides platoniciens et le Système Solaire

Alors que Kepler réfléchissait sur l'organisation des six planètes du Système Solaire, il se demanda quel lien il pourrait exister entre les dimensions de leurs orbes. Car Kepler était certain que la disposition des planètes avait été établie par Dieu, le Créateur.

Au départ, Kepler essaya d'utiliser des figures planes (le triangle équilatéral, le carré, le pentagone, l'hexagone) qu'il plaçait entre les orbes des planètes. Malheureusement, il ne put arriver à une correspondance liée aux figures planes avec ce système, car les planètes se déplacent dans trois dimensions ("or les corps du monde ont reçu, pour accomplir leur course, des solides ou des espaces à trois dimensions", Notes de Sur l'admirable proportion des ordres célestes).

Il réitéra alors sa tentative avec les cinq solides de Platon : le tétraèdre, le cube, l'octaèdre, le dodécaèdre et l'icosaèdre. On peut représenter les propriétés de ces solides dans un tableau :

Solide \ Propriété Nombre de faces Forme géométrique des faces Nombre de sommets Nombre d'arêtes
Tétraèdre
4
Triangles équilatéraux
4
6
Cube
6
Carrés
8
12
Octaèdre
8
Triangles équilatéraux
6
12
Dodécaèdre
12
Pentagones réguliers
20
30
Icosaèdre
20
Triangles équilatéraux
12
30

Après plusieurs essais, il trouvit l'ordre dans lequel les solides devaint être placés pour correspondre avec les distances entre les sphères des planètes : le cube est inscrit entre les sphères de Jupiter et de Saturne, le tétraèdre entre celles de Jupiter et de Mars, le dodécaèdre entre celles de Mars et de la Terre, l'isocaèdre entre celles de le Terre et de Vénus, l'octaèdre entre celles de Vénus et de Mercure.

Les cinq solides de Platon entre les six orbes planétaires

 

Cette proposition d'organisation du Système Solaire fut très bien acceptée par les contemporains de Kepler, car on pouvait alors voir une harmonie dans la disposition des planètes.

Malheureusement, cette disposition n'est plus acceptable aujourd'hui car, premièrement, il n'existe que cind solides platoniciens et neuf planètes constituent notre Système Solaire et deuxièmement, les distances entre les planètes dont s'est servi Kepler n'étaient évidemment pas du tout précises, ce qui montre que son propre modèle est totalement erronné.

 

II. Les lois de Kepler

Les trois lois de Kepler constituent la plus grande partie de son oeuvre (notamment Astronomia nova et Harmonices mundi) et sont toujours considérées comme vraies, depuis 1609 ! C'est dire l'importance qu'elles ont prise dans la vie de Kepler. Leur problème réccurent est qu'étant donné le peu de moyens mis à sa disposition à l'époque, ces lois ne peuvent être qu'empiriques. Nous allons étudier en détail ces lois, notamment en expliquant la démonstration de la première loi, qui a aussi servi à l'établissement des deux autres.

         1) La première loi, ou "loi des ellipses" (1605)

Enoncé de la loi

Les planètes décrivent des orbites elliptiques dont le Soleil occupe l'un des foyers

Démonstration

Pour démontrer cette loi, ainsi que les deux autres, Kepler utilisa les observations faites pas Tycho Brahé à propos de l'orbite de la planète Mars.

Il connaissait déjà plusieurs autres mesures très utiles :

         - période de rétrogradation de Mars (notée T): 780 jours
         - période sidérale de la Terre (notée TT) : 365 jours

  •    Dans un premier temps, Kepler a cherché à déterminer TM, la période sidérale de Mars.
  • On peut voir que, pendant une période de rétrogradation de Mars, la Terre a le temps de faire plus de deux tours autour du Soleil (car 780 = 365 * 2 + 50). Mars a donc fait plus d'un tour pendant cette période. L'angle à ajouter aux deux tours de la Terre (720°) et au tour de Mars (360°) pour constater une nouvelle opposition est obligatoirement le même car les deux planètes doivent être alignées avec le Soleil.

    Si l'on considère comme circulaire uniforme le mouvement des planètes, on peut exprimer leur vitesse angulaire ω de deux façons différentes :

    Terre : ωT = (720 + α)/T          et          ωT = 360/TT          donc         (720 + α)/T = 360/TT

    Mars : ωM = (360 + α)/T         et          ωM = 360/TM        donc         (360 + α)/T = 360/TM

    On a alors :

    Terre : α/T = 360/TT - 720/T

    Mars : α/T = 360/TM - 360/T

    Puis :

    360/TT - 720/T = 360/TM - 360/T

    ⇔ 360/TM = 360/TT - 720/T + 360/T

    ⇔ 1/ TM = 1/TT - 1/T

    ⇔ TM = (TT * T)/(T - TT) ≈ 687 jours

    Mars fait donc le tour du Soleil en 687 jours.

    Cette animation permeet de comprendre visuellement ce phénomène :

  • Il a ensuite cherché à déterminer la forme de l'orbite de Mars.
  • Pour avoir des informations précises sur la position de Mars, Kepler se servit des observations de Tycho Brahé, ce qui lui permit de connaître les coordonnées angulaires de Mars et de la Terre à certaines dates. Heureusement, Tycho Brahé avait certaines coordonnées qui étaient séparées d'exactement 687 jours. Kepler pu alors trouver la position de Mars en utilisant la position de la Terre à deux dates séparées de 687 jours.

    Les mesures de Tycho Brahé peuvent être représentées dans un tableau :

    Date de l'observation Terre Longitude héliocentrique Mars Longitude géocentrique
    17 février 1585
    5 janvier 1587
    159°23'
    115°21'
    135°12'
    182°08'
    19 septembre 1591
    6 août 1593
    5°47'
    323°26'
    284°18'
    346°56'
    7 décembre 1593
    25 octobre 1595
    85°23'
    41°42'
    3°04'
    49°42'
    28 mars 1587
    12 février 1589
    196°50'
    153°42'
    168°12'
    218°48'
    10 mars 1585
    26 janvier 1587
    179°41'
    136°06'
    131°48'
    184°42'

    Dans ce tableau, la droite reliant le Soleil à la Terre au moment de l'équinoxe de printemps est considéré comme l'axe 0°. Avec les schémas suivants, on peut comprendre comment interpréter les mesures du tableau :

     

    687 jours séparent le 17 Février 1585 et le 5 Janvier 1587, donc Mars est au même endroit à ces deux dates. En revanche, la Terre n'a pas fait deux tours complets. Kepler a donc mesuré les angles entre l'horizontale (l'axe 0°) et la direction Soleil-Terre puis entre l'horizontale et la direction Terre-Mars à ces deux dates. Ceci permet donc de repérer un point de l'orbite de Mars.

    Il procéda de même pour les autres dates et obtint donc 5 positions de Mars.

    Il nomma la position P1 "aphélie" de Mars et la position P2 (obtenue avec les données du 19 septembre 1591 et du 6 août 1593) "périphélie" de Mars. Ces deux positions sont exactement opposées par rapport au Soleil.

          

     

     

    Si l'orbite de Mars était un cercle, on devrait obtenir le diamètre de ce cercle en joignant la périphélie à l'aphélie. Malheureusement, le milieu du segment [P1P2] ne correspond pas avec le Soleil et si l'on trace le cercle ayant pour centre le milieu de [P1P2], il ne peut pas passer par tous les points ! Kepler essaya même de voir si aucun cercle ayant pour centre le milieu de [P1P2] ne passait par 3 des 5 points qu'il a trouvé ... sans succès. Il savait donc que l'orbite de Mars n'était pas un cercle.

    L'idée de l'ellipse lui vient à ce moment : il considéra le segment [P1P2] comme le grand axe de l'ellipse et le Soleil comme un de ses foyers. Cette hypothèse fonctionnait parfaitement ... et fonctionne toujours, malgré les erreurs de précision qu'a connu Kepler.

    Remarque : cette loi est vraie non seulement pour la Terre, mais aussi pour toutes les planètes du Système Solaire. Elle est d'ailleurs devenue un "critère d'appartenance" à notre Système Solaire.

     

             2) La deuxième loi, ou "loi des aires " (1604)

    Enoncé de la loi

    Le rayon vecteur allant du Soleil à la planète balaye des surfaces égales pendant des intervalles de temps égaux.


    Illustration de la deuxième loi de Kepler
    N.B. : Les positions indiquées sur ce schéma ne correspondent pas aux positions indiquées pour la première loi

    Idées de Kepler

    Pour trouver cette loi, Kepler remarqua que la Terre tournait plus vite lorsqu'elle était près du Soleil que lorsqu'elle s'en éloignait. Il fit des essais avec plusieurs relations et trouva cette loi après plusieurs mois de calculs.

    L'animation ci-dessous permet de bien comprendre le principe de cette loi (il faut déplacer le petit point bleu pour changer les propriétés de l'ellipse, sui est un cercle au départ) :

    On remarque que plus l'excentricité de l'ellipse augmente, plus l'amplitude de la vitesse de la planète augmente (très rapide près du Soleil et très lente loin du Soleil).

     

             3) La troisième loi, ou "loi des périodes "

    Enoncé de la loi

    Le carré de la période sidérale d'une planète autour du Soleil est proportionnel au cube de la demi-longueur de l'axe principal de son orbite.

    Interprétation

    Le rapport du carré du temps que met une planète à faire un tour autour du Soleil (T²), par le cube du demi-grand axe (a3)de l'ellipse décrite par son orbite, est le même quelle que soit la planète du Système Solaire.

    On a donc : T2/a3 constant quelle que soit la planète du Système Solaire

    On remarquera que cette loi, contrairement aux deux autres, lie les planètes du Système Solaire entre elles. C'est pour cette raison que cette loi est aussi appelée "loi harmonique".

     

    III. Conclusion

    Après l'analyse des travaux de Kepler, on constate que tout ce qu'il a fait d'important a toujours été bien accepté, même si tout n'était pas réel. On remarque aussi que Kepler est constamment à la recherche d'une harmonie du Monde